Si les pages d’un site et//ou de comptes twitter et instagram sont rédigés en langue anglaise, et que les prix sur ledit site apparaissent en premier lieu en dollars pour une livraison aux Etats Unis, cela ne suffit pas à retenir que lesdites pages ne sont pas destinées au public français auquel elles sont facilement accessibles. Ce d’autant que les fonctionnalités desdits comptes ‘rechercher’ ‘J’aime’ ‘Afficher les commentaires’ tout comme les onglets de bas de page ‘A propos de nous’, ‘presse’ ‘conditions’ sont rédigés en français.
Affaire Levi Strauss & Co.
La société de droit portugais Each & Other a découvert que les sociétés Levi Strauss exploitaient sans son autorisation en France notamment dans deux boutiques situées dans le 2ème arrondissement de Paris, le signe « Made for each Other » pour désigner les vêtements qu’elle commercialisait, et avaient reproduit la même mention dans un bandeau sur leur site internet pour présenter leur service de personnalisation de vestes en jean, ainsi que sur les réseaux sociaux Instagram et Twitter.
Compétence du juge français
Le juge de la mise en état a retenu la compétence des juridictions françaises au titre de la matérialisation du dommage allégué en France du fait des actes de contrefaçon de la marque Each & Other par les sociétés Levi Strauss & Co.
Application du Règlement européen Bruxelles I bis
L’action en cause relève, en tant qu’elle porte sur une marque nationale et sur des faits de concurrence déloyale et parasitaire, des règles de compétence juridictionnelle énoncées par le règlement n°1215/2012 du 12 décembre 2012 dit ‘Bruxelles I bis’, en application duquel une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne (UE) peut être attraite devant les juridictions d’un autre État membre où ‘le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire’, et en tant qu’elle porte sur une marque de l’Union européenne, des règles de compétence spéciales énoncées par le règlement n°207/2009, modifié par le règlement 2015/2424 du 16 décembre 2015 sur les marques de l’Union européenne, en application duquel le titulaire d’une marque peut choisir de porter son action en contrefaçon devant le tribunal des marques de l’Union européenne du territoire sur lequel ‘les faits de contrefaçon ont été commis ou menacent d’être commis’.
Lorsque le litige est relatif à l’atteinte à une marque nationale du fait de l’utilisation par un annonceur d’un mot clé identique à ladite marque sur le site internet d’un moteur de recherche, il peut être porté, au titre de la matérialisation du dommage, devant les juridictions de l’État membre dans lequel la marque est protégée.
Enfin, lorsque les actes reprochés sont des faits de contrefaçon de marques et de concurrence déloyale et parasitaire résultant de publicités diffusées sur internet, il convient, pour retenir la compétence des juridictions françaises, de vérifier que les sites et comptes litigieux sont accessibles aux consommateurs ou aux professionnels français auxquels ils sont destinés, peu important le fait invoqué par les sociétés appelantes que les publicités litigieuses ont été mises en ligne en dehors du territoire français. Télécharger la décision