Dans le cadre d’une enquête de présomption de fraude fiscale sur ses opération de Cash-pooling, la société LVMH FINANCE BELGIQUE a obtenu la rétractation de l’ordonnance du JLD de Paris ayant autorisé dans les locaux de la société LVMH à Paris, la saisie de plus d’un million de ses documents comptables et juridiques.
Présomption de fraude : une motivation insuffisante
L’ordonnance rendue par le JLD du TJ de Paris était insuffisante à démontrer une présomption de fraude et en l’absence de caractérisation des conditions posées par l’article L16B du LPF, cette ordonnance a été déclarée mal fondée en appel.
La société de droit belge LVMH FINANCE BELGIQUE SA était présumée avoir exercé ou exercer à partir du territoire national, une activité de gestion de trésorerie intra- groupe, sans souscrire les déclarations fiscales y afférentes et ainsi omettre de passer les écritures comptables correspondantes et ainsi se soustraire à l’établissement ou paiement de l’impôt.
L’article L 16B du LPF prévoit que le JLD peut rendre une ordonnance autorisant des visites domiciliaires lorsqu’il estime qu’il existe des présomptions de fraude qu’un contribuable se soustrait à l’établissement ou au paiement des impôts […], le juge doit procéder à une analyse concrète des éléments qui lui sont soumis par l’administration fiscale pour apprécier l’existence des présomptions de fraude.
Notion de Cash-pooling
La société de droit belge LVMH FINANCE BELGIQUE SA est une centrale de trésorerie, du groupe LVMH. Son activité consiste à centraliser les flux de trésorerie d’un groupe de sociétés en recevant des flux de trésorerie de la part des sociétés du groupe liées à elle par un accord conventionnel et à répondre aux besoins de trésorerie de ces mêmes sociétés (l’existence au sein du groupe LVMH d’une centrale de trésorerie n’est pas constitutive d’une fraude).
Absence de présomption de fraude
La société a déposé très régulièrement ses comptes annuels et elle a fait l’objet de plusieurs vérifications de comptabilité entre 2011 et 2019. Suite à une demande d’assistance administrative internationale auprès des autorités fiscales belges dans le cadre d’une vérification de comptabilité auprès d’une filiale du groupe, la société de droit belge LVMH FINANCE BELGIQUE a transmis en mars 2018 des accords fiscaux conclus avec les autorités fiscales belges.
Il apparaissait que la délocalisation d’une activité de gestion de trésorerie intra-groupe vers une filiale en Belgique vise à une meilleure compétitivité et une gestion optimisée, or ces éléments étaient parfaitement connus de l’administration fiscale française. Le choix d’implantation de LFB en Belgique était motivé aussi par un but fiscal, ce régime était parfaitement connu et a fait l’objet d’une validation expresse par l’administration fiscale française confirmée par un écrit en 2019.
Ainsi , les administrations fiscales française et belge avaient parfaitement connaissance de la mise en place de LFB en tant que centrale de trésorerie du groupe LVMH et des modalités de son fonctionnement . Il résulte en particulier de la requête de la DNEF que dès 2011, dans le cadre d’une procédure de vérification de comptabilité de LVMH SE, l’administration a examiné en détail la question du transfert de l’activité de centralisation du groupe LVMH, assurée jusqu’en octobre 2009 par LVMH SE à la société LFB.
Par la suite, dans le cadre de vérifications de comptabilité de différentes sociétés du groupe LVMH, un dialogue s’est instauré entre l’administration fiscale française et LVMH concernant l’activité de LFB, les multiples éléments d’information échangés n’ont jamais conduit l’administration fiscale à contester la réalité de l’activité de LFB ni la localisation de son siège social.
Ainsi, la requête de l’administration datée du 4 septembre 2019 auprès du JLD pour obtenir l’autorisation de visites domiciliaires concernant une entité dont elle connait l’existence , le fonctionnement et l’objet social depuis 2009, interroge.
Par ailleurs, les moyens attribués à LVMH FINANCE BELGIQUE depuis 2009 (équipe de 6 à 7 personnes à temps plein ou de 5 à 6 salariés), apparaissent suffisants pour effectuer son activité de gestion de trésorerie intra-groupe, l’affirmation selon laquelle LFB n’aurait pas les ressources nécessaires en Belgique à la gestion de son activité de centrale de trésorerie n’était pas démontrée. Télécharger la décision