27 avril 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 21/00533

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RUL/CH

S.A.S. COLAS FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice et venant aux droits de la SAS COLAS NORD EST

C/

[E] [X]

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 27 AVRIL 2023

MINUTE N°

N° RG 21/00533 – N° Portalis DBVF-V-B7F-FX3N

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de DIJON, section Industrie, décision attaquée en date du 15 Juin 2021, enregistrée sous le n° 20/00093

APPELANTE :

S.A.S. COLAS FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice et venant aux droits de la SAS COLAS NORD EST

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me David BOZIAN de la SELARL CABINET GUIDON – BOZIAN, avocat au barreau de NANCY, et Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON substituée par Me Harmonie TROESTER, avocat au barreau de DIJON

INTIMÉ :

[E] [X]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Jean-Philippe SCHMITT, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 14 Mars 2023 en audience publique devant la Cour composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre, Président,

Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,

qui en ont délibéré,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,

ARRÊT rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M. [E] [X] a été embauché par la société COLAS NORD EST (ci-après société COLAS) par un contrat à durée indéterminée à temps plein à compter du 1er juillet 1999 en qualité de conducteur d’engin.

Au dernier état de la relation de travail, il occupait le poste de régleur finisseur.

Le 18 octobre 2019, il a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 30 suivant assorti d’une mise à pied à titre conservatoire.

Il a été licencié pour faute grave le 12 novembre 2019.

Par requête du 28 février 2020, il a saisi le conseil des prud’hommes de Dijon afin de faire juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et faire condamner l’employeur aux conséquences indemnitaires afférentes.

Par jugement du 15 juin 2021, le conseil de prud’hommes de Dijon a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la société COLAS NORD EST à, notamment, payer au salarié diverses sommes à titre d’indemnité de préavis et congés payés afférents, d’indemnité légale de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par déclaration formée le 13 juillet 2021, la société COLAS FRANCE venant aux droits de la société COLAS NORD EST a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières écritures du 29 mars 2022, l’appelante demande de :

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il :

* a jugé que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

* l’a condamnée à payer à M. [X] les sommes suivantes :

– 4 940,34 euros bruts à titre d’indemnité de préavis, outre 494,03 euros bruts de congés payés afférents,

– 14 683,79 euros nets à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 30 000 euros nets de CSG-CRDS à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* l’a condamnée aux dépens,

* lui a ordonné de remettre à M. [X] le bulletin de paye, l’attestation Pôle Emploi et le certificat de travail rectifiés,

– juger que le licenciement pour faute grave est bien fondé,

– débouter le salarié de ses demandes à titre d’indemnité légale de licenciement, d’indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– le débouter de sa demande incidente,

– le débouter de ses plus amples demandes,

– le condamner à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens de l’instance.

Aux termes de ses dernières écritures du 3 janvier 2022, M. [X] demande de :

– débouter la société COLAS de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

– réformer le jugement déféré en qu’il a condamné l’employeur à lui payer la somme de 30 000 euros nets de CSG-CRDS à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– condamner la société COLAS à lui payer la somme de 38 287,64 euros nets de CSG-CRDS à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– confirmer le jugement déféré pour le surplus, sauf à dire que les condamnations seront prononcées contre la société COLAS FRANCE venant aux droits de la société COLAS NORD EST,

– juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

– condamner la société COLAS à lui payer les sommes suivantes :

* 4 940,34 euros bruts à titre d’indemnité de préavis, outre 494,03 euros bruts au titre des congés payés afférents,

* 14 683,79 euros nets à titre d’indemnité légale de licenciement,

* 38 287,64 euros nets de CSG-CRDS à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile de 1ère instance et 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile d’appel,

– dire que les sommes salariales porteront intérêts au taux légal à compter du dépôt de la requête prud’homale,

– ordonner à la société COLAS de lui remettre les documents légaux rectifiés suivants :

* bulletins de paie,

* attestation Pôle Emploi,

* certificat de travail,

– condamner la société COLAS aux dépens.

Pour l’exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour relève que les parties s’accordent sur le fait que l’employeur de M. [X] est la société COLAS FRANCE venant aux droits de la société COLAS NORD EST, et non la société COLAS NORD EST tel qu’indiqué dans le jugement déféré.

I – Sur le bien fondé du licenciement :

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de la faute grave commise par le salarié.

Il est constant que lorsque les juges considèrent que les faits invoqués par l’employeur ne caractérisent pas une faute grave, ils doivent rechercher si ces faits n’en constituent pas moins une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Par application des dispositions de l’article L 1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement, notifiée par lettre recommandée avec avis de réception, comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur. La motivation de cette lettre, précisée le cas échéant dans les conditions prévues par l’article L 1235-2 du même code, fixe les limites du litige.

En l’espèce, la lettre de licenciement du 12 novembre 2019 est rédigée dans les termes suivants :

« Le 16 octobre 2019, vous étiez affecté à l’équipe de Monsieur [F] [K], Chef d’équipe, sur le chantier de la route départementale 905 à [Localité 3].

Avant de partir sur ce chantier, plusieurs de vos collègues ont remarqué que vous aviez un comportement anormal, car très agité et ont alors décidé d’alerter la Direction. La chef de centre, Madame [T] [R], a demandé à Monsieur [Z] [G], Adjoint d’exploitation, de se rendre sur le chantier où vous étiez affecté.

Une fois sur place, à 11 heures, Monsieur [Z] [G] a remarqué que vous aviez un comportement agité, laissant présumer un état d’ébriété, et vous a demandé de vous soumettre à un test d’alcoolémie.

En effet, nous vous rappelons que conformément à l’article 13.2.1. du règlement intérieur: «lorsque l’état ou le comportement d’un salarié occupé ou présent sur chantier, carrière, site industriel, poste d’enrobés, centrale à béton, atelier, quel que soit le poste occupé par ce dernier, laisse présumer un état d’ébriété et/ou qu’il est sous l’emprise de stupéfiants, le responsable hiérarchique peut soumettre le salarié à un éthylotest et/ou à un test de dépistage salivaire permettant de contrôler le taux d’alcoolémie et/ou de détecter une consommation récente de stupéfiants ».

Dans ces conditions, Monsieur [Z] [G] vous a informé préalablement des modalités de contrôle. ll vous a ainsi informé que vous serez soumis à un dépistage d’alcoolémie, qui ne peut être effectué qu’avec votre accord et que vous pouvez vous faire assister par un salarié de votre choix appartenant au personnel de l’entreprise, présent sur le lieu de travail au moment où le test est réalisé, conformément à l’article 13.2.2. de notre règlement intérieur.Vous avez choisi Monsieur [F] [K], votre Chef d’équipe comme témoin. Le test s’est révélé positif et vous n’avez pas contesté le résultat du test qui indiquait, que vous aviez consommé une quantité importante d’alcool, le taux d’alcoolémie étant supérieur au taux légal en vigueur prévu par le Code de la route.

En votre qualité de conducteurs d’engins – régleur finisseur au sein de notre société depuis le 1er juillet 1999, vous n’êtes pas sans savoir que le respect scrupuleux des règles de sécurité est essentiel dans l’exercice de notre activité qui présente des risques potentiels, face auxquels l’entreprise se doit de mettre en ‘uvre une politique de sécurité dans le cadre de son obligation de sécurité de résultat.

[…] Votre comportement est manifestement contraire aux consignes élémentaires de sécurité liées à notre secteur d’activité qui vous sont rappelées régulièrement lors de rassemblements tels que les « Starters  », «Safety meeting  » et notamment lors de la « Safety Week » de juin 2018 qui portait sur les dangers de la consommation de stupéfiants et d’alcool.

[…] En l’absence d’explications de votre part, nous n’avons pas pu modifier notre appréciation des faits.

Vous conviendrez qu’une telle attitude est particulièrement grave et ce, d’autant plus que vos manquements génèrent des risques importants pour votre propre sécurité mais aussi pour celle de vos collègues.

Votre comportement irresponsable va à l’encontre des règles de sécurité en vigueur et nuit à l’image de l’entreprise.

Aussi, compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés et de leurs conséquences, nous sommes aujourd’hui dans l’impossibilité de maintenir votre contrat de travail au sein de notre société.

Par conséquent, nous vous notifions, par la présente, votre licenciement pour faute grave, privative d’indemnité de licenciement et de préavis ». (pièce n° 5)

M. [X] conclut à la requalification de son licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse au motif que le contrôle d’alcoolémie dont il a fait l’objet est irrégulier et que, dans tous les cas, la sanction est disproportionnée.

En vertu de l’article L. 4121-1 du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

L’article R. 4228-20 du code du travail prévoit en son alinéa 2 que « lorsque la consommation de boissons alcoolisées, dans les conditions fixées au premier alinéa, est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur, en application de l’article L. 4121-1 du code du travail, prévoit dans le règlement intérieur ou, à défaut, par note de service les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d’accident. Ces mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d’une limitation voire d’une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché ».

L’article L. 1321-3 dispose que « le règlement intérieur ne peut contenir : [‘] 2° Des dispositions apportant aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».

Cela s’inscrit dans la disposition générale de l’article L. 1121-1 du code du travail, selon laquelle « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».

Ainsi, il est admis que l’employeur peut recourir à un contrôle d’alcoolémie permettant de constater l’état d’ébriété d’un salarié au travail, dès lors qu’eu égard à la nature du travail confié à ce salarié, un tel état est de nature à exposer les personnes ou les biens à un danger, et que les modalités de ce contrôle, prévues au règlement intérieur, en permettent la contestation.

En l’espèce, il ressort de l’article 13.2 du règlement intérieur de la société COLAS qu’en cas de présomption d’ébriété d’un salarié le responsable hiérarchique peut le soumettre à un éthylotest au moyen d’un éthylotest conforme à un type homologué et que lorsque le contrôle est positif, il est demandé au salarié s’il souhaite ou non contester le résultat dudit contrôle auquel cas il est procédé immédiatement à un second dépistage réalisé dans les mêmes conditions que le premier.

A titre liminaire, la cour relève que les parties ne discutent pas l’existence du règlement intérieur ni son opposabilité, seulement le respect des dispositions qu’il contient.

Sur le fond, M. [X] :

– conteste avoir eu un comportement anormal, très agité et laissant présumer un état d’ébriété, précisant avoir pris son poste à 6h30 et travaillé de 8h à 11h30 sans difficulté ni commis la moindre erreur,

– la fiche de constat renseignée par M. [G], adjoint d’exploitation qui a procédé au contrôle, ne mentionne aucune difficulté d’élocution, propos incohérent, désorientation, somnolence, haleine alcoolisée, gestes imprécis ou trouble de l’équilibre, seulement une agitation. Quant à la situation « agressivité », elle est renseignée à la fois OUI et NON et la mention manuscrite « comportement énervé » ne permet pas de savoir si elle fait référence à sa situation avant ou après le contrôle ou du fait de l’annonce faite au salarié de devoir quitter le chantier,

– l’employeur ne justifie pas que l’éthylotest est homologué, le document informatif sur l’éthylotest de marque TURDUS produit tardivement à hauteur de cour ne démontrant pas que l’éthylotest utilisé le 16 octobre 2019 était un éthylotest TURDUS, ni même que celui utilisé était « conforme à un type homologué tel qu’utilisé par les pouvoirs publics »,

– alors qu’il a répondu par l’affirmative à la demande d’un second contrôle dans un laboratoire, aucune contre-expertise n’a eu lieu.

Au titre de la charge de la preuve qui lui incombe, la société COLAS produit notamment une « fiche de constat » dressée par M. [G], adjoint d’exploitation, dont il ressort les éléments suivants :

– une description de la situation dans laquelle se trouve le salarié au moment du constat,

– la mention des dispositions médicales qui ont été prises,

– la nature et le résultat du test effectué, ainsi que le souhait du salarié d’une contre-expertise (OUI et NON sont entourés mais la mention NON est raturée). (pièce n° 15)

S’agissant de la question de la légitimité de procéder à un contrôle d’alcoolémie, la cour relève que la fiche de constat est confuse dans la mesure où si pour la plupart des critères indiqués la réponse attribuée est NON , le critère « agressivité » est quant à lui affublé d’une double réponse OUI et NON, le NON étant associé à une flèche dirigée à droite vers le critère « agitation » auquel il est répondu OUI. Au titre des « autres critères », il est fait mention d’un « comportement énervé ».

Cette fiche de constat, du fait de ses imprécisions, n’est pas significative d’un état d’ébriété présumé.

S’agissant des témoignages produits par l’employeur, l’attestation de M. [K], ouvrier qui a assisté M. [X] lors du test, se borne à indiquer que c’est M. [G] qui a relevé le comportement agité de M. [X] et décidé de le soumettre à un test, sans indiquer s’il s’était lui-même interrogé sur son état, de sorte qu’elle est dépourvue de force probante (pièce n° 14).

En revanche, il ressort de l’attestation de Mme [D], responsable planning ayant eu le matin même M. [X] au téléphone, que celle-ci a constaté qu’il tenait des propos très confus et incompréhensibles, au point d’en avertir sa hiérarchie.

A cet égard, si l’ajout qu’à 2 reprises auparavant elle avait vu M. [X] dans son bureau sous l’emprise, selon elle, de l’alcool est sans emport sur sa situation le 16 octobre 2019, il explique la raison pour laquelle elle s’est interrogée. (pièce n° 9)

De même, M. [G], adjoint d’exploitation qui a procédé au contrôle d’alcoolémie, atteste avoir lui-même constaté, une fois sur place à 11h, que le salarié avait un comportement agité, faisant de grands gestes et parlant fort, et qu’il ne lui paraissait pas être dans un état normal.

Dans ces conditions, même si l’employeur ne justifie d’aucun élément émanant des autres salariés qui, selon M. [G] « ont noté un état anormal de M. [X], probablement alcoolisé », et peu important que le salarié ait travaillé de 8h à 11h30 sans difficulté ni erreur, ce qui relève de l’affirmation, il demeure que ces constatations sont précises et caractérisent un comportement anormal sur le lieu de travail, qui plus est en matinée, et s’ajoutent à l’impression de confusion de Mme [D], ce qui suffit à établir non pas l’état d’ébriété qui lui est reproché, ce qui est la finalité du test, mais une présomption d’alcoolisation, ce qui justifie la décision de procéder à un éthylotest.

Il s’en déduit que le contrôle effectué est conforme au règlement intérieur de l’entreprise en ce qu’il le subordonne au constat que « l’état ou le comportement d’un salarié […] laisse présumer un état d’ébriété’.

S’agissant de l’homologation du dispositif d’éthylotest utilisé, l’employeur justifie de la conformité de l’éthylotest de la marque TURDUS au décret n° 2015-775 du 29 juin 2015 et à la réglementation REACH (règlement européen n° 1907/2006 pour sécuriser la fabrication et l’utilisation des substances chimiques dans l’industrie européenne) (pièce n° 25).

Néanmoins, si la fiche de constat établie le 16 octobre 2019 mentionne le numéro de lot de l’éthylotest (05BB180822A) et une date de validité (09/2020), il n’est en revanche aucunement fait mention qu’il s’agit d’un éthylotest de la marque TURDUS.

Une telle mention ne ressort pas non plus de la documentation afférente aux actions de prévention mises en place par la société COLAS pour lutter contre la consommation d’alcool et de stupéfiants au travail (pièces n° 16 à 18).

Il s’en déduit que l’employeur échoue à démontrer que le test d’alcoolémie a été réalisé au moyen d’un éthylotest (ou d’un éthylomètre) conforme à un type homologué tel qu’utilisé par les pouvoirs publics au sens de l’article 13.2.2 du règlement intérieur, de sorte que le contrôle effectué le 16 octobre 2019 est irrégulier et son résultat inopposable au salarié.

Au surplus, il ressort des pièces produites qu’à la question s’il souhaitait une contre-expertise M. [X] a répondu par l’affirmative. Or il n’a pas été procédé à cette deuxième vérification pourtant prévue par le règlement intérieur, l’employeur ne pouvant à cet égard utilement alléguer que le laboratoire était fermé, ce d’autant qu’un nouveau éthylotest suffisait, ni que M. [X] avait accepté les résultats du premier test, et donc qu’il était exonéré de son obligation de procéder à un second test, dès lors que la fiche de constat mentionne qu’une demande de contre-expertise a été formulée.

En outre, l’employeur n’explique pas la contradiction résultant du fait d’une part de considérer que le résultat est accepté, et donc qu’il n’y a pas lieu de procéder à une contre-expertise, et d’autre part de prendre l’initiative de le conduire dans un laboratoire pour procéder à ladite contre-expertise.

Dans ces conditions, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur le moyen tiré de l’absence de contre-expertise ou sur le caractère proportionné de la sanction, le licenciement pour faute grave du salarié fondé sur un état d’ébriété constaté à l’aide d’un contrôle éthylotest non conforme aux dispositions du règlement intérieur et que la cour a déclaré inopposable à l’intéressé doit être requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse, le jugement déféré étant confirmé sur ce point.

Au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et sur la base d’un salaire mensuel moyen qu’il fixe à 2 210 euros bruts auquel il ajoute 76 euros bruts de prime d’ancienneté et un 13ème mois, soit 2 470,17 euros bruts (pièce n° 7), M. [X] sollicite les sommes suivantes :

– 4 940,34 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 494,03 euros au titre des congés payés afférents,

– 14 683,79 euros nets à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 38 287,64 euros nets de CSG/CRDS à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à 15,5 mois de salaire, qu’il justifie par sa difficulté à retrouver un emploi en raison de son âge (54 ans), de son ancienneté et du caractère vexatoire de son licenciement.

La société COLAS conclut au rejet de ces demandes au motif que le licenciement est fondé sur une faute grave.

Compte-tenu des circonstances du licenciement et de la situation du salarié, lequel justifie d’une ancienneté de 20 ans et 6 mois, durée du préavis incluse, il sera alloué à M. [X] les sommes suivantes :

– 4 940,34 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 494,03 euros au titre des congés payés afférents,

– 14 686,79 euros à titre d’indemnité légale de licenciement, tel qu’expressément demandé,

le jugement déféré étant confirmé sur ces points,

– 22 250 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

le jugement déféré étant infirmé sur ce point.

II – Sur les demandes accessoires :

– Sur les intérêts au taux légal :

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a rappelé que les sommes ayant une nature salariale ou assimilées produisent intérêts aux taux légal à compter de la réception par la société COLAS de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes,

– Sur la remise des documents légaux :

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a ordonné à la société COLAS de remettre à M. [X] les documents légaux rectifiés suivants : bulletin de paye, attestation pôle emploi et certificat de travail.

– Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Le jugement déféré sera confirmé sur ces points.

La demande de M. [X] au titre de l’article 700 du code de procédure civile  » de première instance » est sans objet, s’agissant d’une demande déjà accueillie au titre de la confirmation du jugement déféré qu’il sollicite par ailleurs.

La société COLAS sera condamnée à payer à M. [X] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour.

La demande de la société COLAS au titre de l’article 700 du code de procédure civile à sera rejetée.

La société COLAS succombant, elle supportera les dépens d’appel.

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